Romans pour enfants

Les soeurs hiver – Jolan C. Bertrand

Autrefois, il y avait deux sœurs hiver, la Petite et la Grande. La Petite offrait des jours de neige tendres et des glissades tandis que la Grande soufflait le blizzard et le froid mordant. Depuis que la Petite a disparu, les hivers ne sont plus que froid polaire et grosses tempêtes. La Grande n’a jamais cessé de chercher sa sœur mais cette dernière reste introuvable.

Au village de Brume, on s’inquiète de cette situation qui s’éternise. D’autant plus que maintenant il faut aussi compter avec les trolls qui ne se contentent plus de voler simplement les réserves de bois mais s’en prennent également aux biens les plus précieux des habitants : enclume, trophée, hameçons, bouclier, … tout y passe.

Alfred vit au village avec sa grand-mère Brumilda, cheffe du village, et son oncle Ragnar depuis la mort de  ses parents. Alfred est un enfant assez solitaire par la force des choses ; c’est visiblement l’un des seuls – si pas le seul – enfant du village.

« Alfred n’a pas envie de rire.
Ce n’est pas la première fois que ça lui arrive. La plupart du temps, Alfred est un enfant de dix ans comme les autres. Il n’aime presque personne, alors il préfère rester seul, mais il joue et court et rit, comme tout le monde. Certains jours pourtant, il n’en a aucune envie. C’est comme si un nuage de vide un peu froid le recouvrait pendant quelques heures. Il appelle ça « être triste pour rien ». »

Il s’occupe comme il peut, aime jouer des tours aux habitants en assaisonnant leur vin ou en jetant toutes les chaussettes droites dans le puit, par exemple. C’est pour cela que lorsque les vols ont commencé, tous ont pensé à lui. Mais il se contente de petites farces, lui, sa grand-mère le sait bien. Pour calmer les habitants de Brume, Ragnar décide de partir à la recherche des trolls pour ramener leurs biens, même si dehors la tempête gronde.

« Frid se penche. Ses longs cheveux blonds glissent autour de leurs deux visages comme un rideau. Un rideau derrière lequel il n’y a que Frid et Alfred, et personne d’autre. Leur nez se touchent presque lorsque Frid chuchote :
– S’il part seul, personne ne le reverra jamais. »

Pourquoi lui a-t-elle dit cela à lui ? Pourquoi n’a-t-elle pas confié ses craintes à un adulte ? Aucune idée mais Alfred n’a pas le choix, il ne va tout de même pas abandonner Ragnar. Il s’enfonce donc lui aussi dans la forêt. Mais un jeune garçon n’est pas de taille à affronter la Grande et le blizzard … D’autant qu’il se pourrait bien qu’il se retrouve touché par un sort en vexant une grande renarde. Heureusement, le monde n’est pas qu’hostile et Alfred rencontrera bientôt de nouveaux alliés.

illustration de Tristan Gion, https://www.instagram.com/gion.tristan

J’ai adoré ce roman d’aventure sur fond de mythologie nordique. J’ai commencé par le lire à voix haute avec William avant que nous ne continuions chacun notre lecture de notre côté car, trop impatient, il m’a piqué mon livre pour le terminer sans moi. Jolan C. Bertrand a des mots de conteurs, on est immédiatement embarqué avec lui. Et le roman est sublimé par les illustrations de Tristan Gion. Une petite pépite destinée aux 9 ans et + mais le vocabulaire est compréhensible pour les plus jeunes donc les gros lecteurs pourront s’y frotter 😊

J’ai également aimé voir l’introduction, tout en simplicité d’un personnage trans en la personne de Ragnar. Il est expliqué à un moment qu’il a eu une époque, avant la naissance d’Alfred, où on utilisait le pronom Elle et qu’un baume magique a été utilisé pour faire pousser sa barbe. Et c’est tout, aucune question supplémentaire, cela passe facilement comme cela devrait toujours être le cas.
En parlant de pronom, l’auteur utilise le pronom « ul » pour les trolls, expliquant qu’uls ne sont pas genrés. Et là aussi, ça passe tout seul. Les enfants ont bien des choses à apprendre aux adultes.

« Les sœurs hiver » de Jolan C. Bertrand, illustré par Tristan Gion.
Dans la collection Neuf de l’Ecole des loisirs

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